5 mai 2022 – TRIBUNE D’AGNÈS BRICARD DANS LE JOURNAL « LES ECHOS » TPE : L’intéressement est la clé du pouvoir d’achat
L’association des salariés au partage du profit peut changer leur relation avec les dirigeants et actionnaires.
OPINION – L’association des salariés au partage du profit est l’un des leviers de réussite de la mutation que les entreprises vont devoir affronter dans un ordre économique nouveau, selon Agnès Bricard. Alors que la sortie de la crise sanitaire laissait entrevoir de belles éclaircies sur les perspectives économiques, le conflit en Ukraine a renversé cette tendance en provoquant des tensions élevées sur les prix des matières et un retour de l’inflation à un niveau jamais atteint depuis le début des années 1990 ! La perte de pouvoir d’achat ressentie par les ménages est immédiate et risque fort de s’aggraver au cours des prochains mois. Les pouvoirs publics se sont immédiatement mobilisés pour mettre en oeuvre un plan de résilience visant à compenser ces pertes pour les ménages et à accompagner les entreprises les plus durement touchées par l’augmentation des prix de l’énergie. Nouveau pacte de partage du profit Dans ce contexte, la question de l’association des salariés au partage du profit, présente dans les programmes de plusieurs candidats à l’élection présidentielle, devient aujourd’hui beaucoup plus prégnante, car elle peut constituer la clé d’une transformation de la relation des salariés avec les dirigeants et actionnaires pour réussir la mutation que les entreprises vont nécessairement devoir affronter dans un ordre économique nouveau. La proposition du Président candidat de rendre obligatoire un dispositif de partage des profits dans les entreprises qui versent des dividendes s’inscrit directement dans cette même démarche. La construction d’un nouveau pacte de partage du profit entre salariés et actionnaires constitue à n’en pas douter une évolution souhaitable dans l’intérêt de tous les acteurs des PME, des ETI et des grands groupes, mais ne doit-elle pas aussi prendre en compte la dimension spécifique des TPE de moins de 11 salariés, qui emploient plus de 3,5 millions de personnes ? L’intéressement, accord complexe à mettre en oeuvre Pour ces petites entreprises, si le nouveau pacte de partage du profit se traduit seulement par la possibilité d’accorder la prime PEPA exonérée fiscalement et socialement, certes, il produira un effet temporairement très positif sur le pouvoir d’achat des salariés, mais il éloignera encore les TPE des ressorts de l’intéressement… De plus, aux côtés de la participation, l’intéressement a toujours constitué un levier pour associer les salariés aux performances de l’entreprise. La mesure de simplification la plus récente, prise en pleine crise sanitaire, a permis aux employeurs de moins de 11 salariés de mettre en place un dispositif d’intéressement par décision unilatérale de l’employeur (DUE) dans les TPE dépourvues de représentants du personnel (Code du travail, art. L. 3312-5, II nouveau). Mais cette nouvelle possibilité n’étant plus applicable au moment du renouvellement de l’accord d’intéressement, la mesure de simplification n’a malheureusement pas rencontré son public et il demeure toujours aussi complexe à mettre en oeuvre dans une TPE. Des solutions pour les TPE Même si l’intéressement a subi de nombreuses réformes depuis son institution par voie d’ordonnance en 1959, il peut en supporter une de plus pour permettre aux TPE de participer à leur échelle à la transformation de la relation entre les salariés et leur dirigeant. Pour développer l’intéressement dans les TPE, il est nécessaire de mettre en oeuvre des mesures de simplification puissantes et pérennes. IDÉES – Participation et intéressement : deux outils pour fidéliser ses salariés Quatre mesures à proposer : autoriser le renouvellement des accords d’intéressement par décision unilatérale de l’employeur dans les TPE de moins de 11 salariés, proposer un accord type simplifié d’intéressement commun à toutes ces TPE, supprimer l’obligation de déposer l’accortise simplifiée auprès des administrations compétentes, et exonérer ces TPE des prélèvements sociaux qui réduisent actuellement les sommes réparties aux salariés au titre de l’intéressement (9,70 %). Tous les acteurs publics et privés spécialisés dans l’accompagnement des TPE, dont les experts-comptables pourraient être mobilisés pour les promouvoir auprès des dirigeants de TPE. L’autrice : |